La journée internationale de la femme est une opportunité de réflexion relative à la condition de la femme notamment celle liée à ses droits. L’objectif de la célébration de cette journée est de permettre aux différents acteurs de la société de faire le point de la situation de la femme à des degrés divers, afin de l’améliorer.
Dans le cadre de la commémoration de cette journée, la rédaction du site web de l’Alliance pour la Promotion du Port de Lomé ( A2PL) donne la parole aux femmes qui dirigent les entreprises au sein du secteur maritime et portuaire de Lomé.
A cet effet, madame Elisabeth Essodolom PALI-TCHALLA, PDG de OTOCI SA s’exprime sur la situation des femmes.
Madame la Directrice Générale, Pourriez-vous vous présenter à nos lecteurs?
Je suis madame Elisabeth Essodolom PALI-TCHALLA, PDG de OTOCI SA, spécialisée dans le Transit maritime, Transports Logistiques, Entreposage, Consignation et Manutention. Je suis Marraine de WIMA Togo (Women in maritim).
En dehors de mes activités dans le secteur maritime, Je suis aussi Directrice Générale de la Société Togolaise de Karité, Présidente de la Filière Karité du Togo (FIKATO), Présidente de l’Interprofession karité du Togo, Membre du comité exécutif de l’Alliance Globale du Karité (AGK), présidente Fondatrice de la Fondation SOIF-TOGO, et marraine de la section togolaise de la Fédération pour la Paix Universelle (FPU).
Je suis au départ une sage-femme d’Etat de formation. J’ai exercé cette noble profession durant quelques années avant de me lancer dans le commerce avec l’ouverture dans les années 80 de ma toute première boutique, ESTETICA 2000 qui s’est illustrée dans le commerce des bijoux et produits de beauté dans la sous-région ouest-africaine et dans d’autres pays du continent.
C’est d’ailleurs à travers mes activités de commerce via ESTETICA 2000 que j’ai découvert l’opportunité de me lancer dans le secteur maritime comme la toute première femme à se hisser parmi les hommes au Port Autonome de Lomé précisément dans la vente des véhicules d’occasion.
Quel regard portez-vous sur l’évolution des femmes sur le plan professionnel au sein des instances de direction des entreprises de la place portuaire de Lomé
Je pense qu’aujourd’hui il est important de saluer les efforts que fournissent les femmes à tous les niveaux du port autonome de Lomé. Le nombre de femmes ces dix dernières années s’est accru dans l’activité portuaire et cette tendance doit se poursuivre. S’il est vrai que les femmes sont de plus en plus nombreuses à s’affirmer sur la plate forme portuaire, il n’en demeure pas moins vrai que leurs compétences ne s’ auraient simplement se limiter à l’administration. Et c’est ça le défi qui me semble important à relever : nous devons en tant que femmes briser tous les stéréotypes et nous imposer dans des secteurs autrefois réservés aux hommes.
Nous avons, avec l’ex-présidente de la commission de l’Union Africaine, madame Nkossassana Dlamini Zuma, lancé en 2016 à Lomé, lors du sommet de l’Union Africaine sur la sécurité maritime, la paix et le développement en Afrique, cette dynamique au sein de WIMA-TOGO qui consiste à promouvoir davantage les femmes dans les activités maritimes.
Les femmes ne doivent pas seulement rester dans les bureaux, elles sont aussi capables d’aller au large. Il ya deux ans, à l’occasion de la journée internationale de promotion des droits de la femme, j’avais eu l’occasion d’animer une conférence avec une femme togolaise capitaine de bateau. C’est vous dire qu’il y a une grande évolution dans ce sens. Ce sont des exemples comme ça qui suscite de l’émulation au sein de la gente féminine.
Je voudrais profiter de cette occasion pour saluer la politique de promotion du leadership féminin portée par le chef de l’Etat Togolais, son Excellence Monsieur Faure Essozimna GNASSINGBE. Il a su faire confiance en la femme en la propulsant aux plus hautes sphères de la vie politique de notre pays.
Les femmes en général et la jeune fille en particulier doivent profiter de ce nouvel élan pour s’imposer au milieu des hommes. Il faut savoir se frayer du chemin parmi les hommes et se dire que ce qu’ils font ne nous est pas impossible. Les femmes doivent oser, car comme on le dit, la vie est un combat. J’exhorte mes sœurs en général à se battre.
Vous arrive-t-il de rencontrer des obstacles dans votre environnement professionnel, relatifs à votre statut de femme ?
De nos jours, les mentalités ont commencé par changer et de manière générale le regard sur la femme eu égard à ses occupations professionnelles a également changé.
En ce qui me concerne particulièrement, je ne pense pas avoir à ce jour de réelles difficultés sur le plan professionnel liées au fait que je suis une femme. Je suis cheffe d’entreprise avec sous ma responsabilité des centaines d’employés hommes comme femmes.
J’assume valablement mes prérogatives en tant que premier responsable de l’entreprise en définissant les orientations stratégiques.
Je concède tout de même que c’est une curiosité pour beaucoup de me voir en gilet sur le bateau pour m’assurer parfois du bon déroulement des activités de mes agents lors des débarquements à quai.
Mais il faut a vouer que mes débuts n’étaient pas du tout facile simplement parce qu’étant une femme, je cherchais à me faire un nom dans une activité totalement gérer par des hommes. A l’époque, ma stature de femme était un frein. Mais avec la grâce de Dieu, je suis parvenue à briser ce préjugé.
Etre femme et avoir un parc pour la vente des véhicules d’occasion, ou être manutentionnaire; je dois vous avouer que ce n’était pas gagné d’avance à l’époque. Ce qui ne semblait pas être possible il y a une vingtaine d’année l’est aujourd’hui et j’en suis fier. Notre combat a porté des fruits. Il peut arriver que certains hommes ressentent une certaine gêne de se soumettre aux ordres d’une femme, mais comprenez que quand on est dans le cadre d’une entreprise, ces stéréotypes n’ont pas droit decité.
Est-ce qu’il existe dans le secteur maritime et portuaire des métiers que vous souhaiteriez que les femmes exercent davantage ?
Evidemment! Vous savez, au niveau d’OTOCI SA, lorsqu’il m’arrive d’étudier les dossiers pour le recrutement des agents chauffeurs, je dois vous avouer que les candidatures féminines mes ont prioritaires. Je trouve que dans ce domaine les femmes sont absentes. Conduire sur le bateau ne doit pas être exclusivement réservé aux hommes. De manière générale lorsqu’on regarde sur toute la plateforme portuaire, les femmes sont quasi absentes dans la conduite ou le maniement des engins lourds. Les femmes doivent oser dans ces secteurs présentés à tort comme étant de l’apanage des hommes.
Au niveau du personnel navigant, je pense que nous les femmes, nous devons aussi relever le défi de notre sous représentativité. C’est toujours une belle image lorsqu’une femme est aux commandes d’un navire. Les femmes ont l’opportunité de se faire former au Togo aux métiers de la mer. Il y a sur le territoire togolais une structure de formation de renom qui fait du bon travail. Ce n’était pas possible il ya quelques années.
Je crois qu’il est important pour les jeunes filles de se faire former pour jouer leur partition dans l’économie bleue. Que nos jeunes filles cessent de penser qu’au port, elles ne sont compétentes que pour être secrétaire de direction, assistante, comptable ou autre. Elles ont aussi des capacités pour s’imposer dans des secteurs autrefois «réservés» aux hommes.
Quels sont les conseils que vous donneriez aux femmes qui souhaitent réussir leurs carrières dans les domaines liés à la chaîne des transports et de la logistique ?
C’est plutôt un appel que moi je voudrais lancer à l’endroit de mes sœurs. Un appel à se lever pour briser ce plafond de verre. Nous avons pris l’habitude de nous fixer des barrières imaginaires qui compromettent dangereusement notre avenir professionnel. La chaine de transport et de la logistique est un secteur très promoteur et je pense que les Femmes doivent saisir les différentes opportunités qu’elle offre.
Notre pays le Togo à travers l’axe1 du Plan National de Développement (PND2018-2022) ambitionne des construire un hub logistique de premier plan pour s’imposer dans la sous-région ouest africaine. C’est dire combien le transport et la logistique ont une réelle opportunité dans cet ambitieux plan de développement de notre pays.
Les femmes sont donc appelées à apporter leur savoir-faire dans ce domaine très important. Cela implique donc qu’elles se fassent former parce que ce sont des domaines très exigeants. Ce n’est pas parce que vous êtes femmes qu’on vous fera confiance, mais on viendra à vous parce que vous avez une qualification et parce que vous faites preuve d’un savoir-faire hors normes.
Il faut toujours faire de la recherche permanente de la qualité votre cheval de bataille. Lorsque vous êtes une femme compétente, et votre savoir-faire et votre savoir-être sont empreints de qualité et de professionnalisme, on ne cherchera pas la raison de votre choix dans le népotisme ou le favoritisme, mais plutôt dans votre capacité à vous distinguer des autres par votre compétence. C’est cette vertu que je voudrais appeler les femmes à cultiver, quelques soient les domaines dans lesquels elles sont appelées à exercer.
Avez-vous un mot de fin?
Je voudrais pour finir, vous dire merci pour le choix porté sur ma modeste personne pour cette interview. A l’endroit de toutes les femmes je dis: levons-nous et osons! Nous avons la capacité de nous imposer là où on ne nous attend pas.
Quelques soient les difficultés, il faut savoir qu’aucun secteur n’est facile. Apprenons à transformer nos difficultés supposées ou réelles en opportunités pour franchir de nouveaux paliers dans la droite ligne de notre épanouissement professionnel.
Je voudrais à l’occasion de la journée internationale des droits de la femme rendre hommage à toutes les femmes battantes du Togo, à son Excellence Monsieur le Président de République pour la confiance faite aux Femmes en les confiant de très hautes responsabilités. Je leur souhaite plein succès dans l’exercice de leurs fonctions. Bonne fête à toutes les femmes. Je vous remercie !